Maître du road movie et grand adorateur de l’œuvre de Kerouac, Walter Salles revient sur le défi que représentait l’adaptation de Sur la route – présenté en Compétition Officielle.
Quel est votre lien au roman de Jack Kerouac ?
J’ai découvert Sur la route à 18 ans, et je suis resté sous le choc de cette lecture. Les personnages du roman annonçaient une liberté radicale que l’on ne connaissait pas dans mon pays à cette époque - je suis né dans les années 70, au cœur des dictatures. J’ai été extrêmement marqué par cette façon de vivre et de décrire le sexe à fleur de peau - au même moment, les films d’Oshima étaient censurés au Brésil - et par cette idée que les voyages étaient formateurs d’identité. J’ai vu dans ce livre un manifesto libertaire qui explosait tous les interdits : le contre-champ de ma vie !
La grande réussite de votre film repose sur son rythme, très fidèle au roman : comment l’avez-vous travaillé ?
Si un film n’est bâti que sur l’accélération, on ne sent plus les moments de fuite en avant, ils s’annulent entre eux. La structure de Sur la route devait donc être faite de mouvements d’accélération et de temps suspendus, pour que l’on sente la solitude de ces personnages, et leur douleur éventuelle. La passion commune que tous les acteurs portaient au livre nous a beaucoup aidés : ils connaissaient chaque mouvement interne du livre. Au moment de tourner la scène qui voit Sal Paradise taper sur sa machine à écrire, Sam Riley écoutait du jazz à fond : Charlie Parker et Miles Davies rythmaient sa frappe…
Quelle a été la part d’improvisation des comédiens ?
L’idée d’improvisation, qui est au cœur du jazz, et qui a été absorbée par Kerouac, ne pouvait pas être absente du film. Viggo Mortensen est allé particulièrement loin : quand il est arrivé à la Nouvelle-Orléans pour jouer Old Bull Lee, il portait déjà les vêtements, le chapeau et le colt 38 du personnage. Il avait aussi avec lui la même machine à écrire que Burroughs, et il avait fait des recherches sur ce que ce dernier lisait à l’époque : d’où son impro sur la traduction d’un roman de Céline…
Certains voient dans Easy Rider l’équivalent cinématographique de Sur la route. Et vous ?
Je crois que l’on peut retrouver des embryons de Sur la route dans plusieurs films américains : Easy Rider, pour le mouvement et l’idée de l’ultime frontière américaine, mais aussi Rumble Fish de Coppola, ou certains films de Cassavetes, dans lesquels on sent le désir d’expérimenter et de vivre à fleur de peau. Tous ces films portent un peu de l’ADN de Sur la route. De la même manière que la jazz poetry a évolué à travers le travail de Bob Dylan, et que les poètes de la beat génération se retrouvent dans l’écriture de Leonard Cohen ou les chansons de Neil Young. Plus tard, ce mouvement se poursuit encore quand les Clash jouent avec Allen Ginsberg : la révolution comportementale qui est à l’origine de la contre-culture américaine a commencé chez les poètes beat !
Alice, pour Anwarock la webradio qui aime le 7ème art!
Source: RS magazine
Quel est votre lien au roman de Jack Kerouac ?
J’ai découvert Sur la route à 18 ans, et je suis resté sous le choc de cette lecture. Les personnages du roman annonçaient une liberté radicale que l’on ne connaissait pas dans mon pays à cette époque - je suis né dans les années 70, au cœur des dictatures. J’ai été extrêmement marqué par cette façon de vivre et de décrire le sexe à fleur de peau - au même moment, les films d’Oshima étaient censurés au Brésil - et par cette idée que les voyages étaient formateurs d’identité. J’ai vu dans ce livre un manifesto libertaire qui explosait tous les interdits : le contre-champ de ma vie !
La grande réussite de votre film repose sur son rythme, très fidèle au roman : comment l’avez-vous travaillé ?
Si un film n’est bâti que sur l’accélération, on ne sent plus les moments de fuite en avant, ils s’annulent entre eux. La structure de Sur la route devait donc être faite de mouvements d’accélération et de temps suspendus, pour que l’on sente la solitude de ces personnages, et leur douleur éventuelle. La passion commune que tous les acteurs portaient au livre nous a beaucoup aidés : ils connaissaient chaque mouvement interne du livre. Au moment de tourner la scène qui voit Sal Paradise taper sur sa machine à écrire, Sam Riley écoutait du jazz à fond : Charlie Parker et Miles Davies rythmaient sa frappe…
Quelle a été la part d’improvisation des comédiens ?
L’idée d’improvisation, qui est au cœur du jazz, et qui a été absorbée par Kerouac, ne pouvait pas être absente du film. Viggo Mortensen est allé particulièrement loin : quand il est arrivé à la Nouvelle-Orléans pour jouer Old Bull Lee, il portait déjà les vêtements, le chapeau et le colt 38 du personnage. Il avait aussi avec lui la même machine à écrire que Burroughs, et il avait fait des recherches sur ce que ce dernier lisait à l’époque : d’où son impro sur la traduction d’un roman de Céline…
Certains voient dans Easy Rider l’équivalent cinématographique de Sur la route. Et vous ?
Je crois que l’on peut retrouver des embryons de Sur la route dans plusieurs films américains : Easy Rider, pour le mouvement et l’idée de l’ultime frontière américaine, mais aussi Rumble Fish de Coppola, ou certains films de Cassavetes, dans lesquels on sent le désir d’expérimenter et de vivre à fleur de peau. Tous ces films portent un peu de l’ADN de Sur la route. De la même manière que la jazz poetry a évolué à travers le travail de Bob Dylan, et que les poètes de la beat génération se retrouvent dans l’écriture de Leonard Cohen ou les chansons de Neil Young. Plus tard, ce mouvement se poursuit encore quand les Clash jouent avec Allen Ginsberg : la révolution comportementale qui est à l’origine de la contre-culture américaine a commencé chez les poètes beat !
Alice, pour Anwarock la webradio qui aime le 7ème art!
Source: RS magazine