Introduction
Fort de près de 35 ans d’histoire, le Metal n’a cessé de créer l’engouement du public, et ce dès la publication du premier album de Led Zeppelin. Né à la fin des années 60 du croisement du blues rock anglais et de la musique psychédélique, cet enfant illégitime a toujours suscité le rejet de la presse et du public rock. Style controversé, on lui a souvent reproché sa théâtralité, son manque de sens et de profondeur, son coté démonstratif, sa violence... De manière générale, le Metal n’a en effet d’autres prétentions que la distraction du public. Les thèmes des chansons tournent souvent autour de la fête, de l’alcool, du sexe, de la mystique, du fantastique, des films d’horreur... Malgré – ou grâce à – ces difficultés, le metal est resté populaire et a toujours su s’adapter à l’air du temps.
Ce style de musique se décompose en une multitude de sous-genres, appellations souvent créées par les journalistes soucieux de classification et dont les frontières ne sont pas toujours évidentes à déterminer. Vous trouverez dans ce document plusieurs discographies correspondant aux sous-genres les plus établis. Comme toute classification, ce procédé est forcément contestable puisqu’il ne peut pas y avoir un accord total sur tel groupe ou telle dénomination.
Cette séance d’écoute se fera de manière chronologique, en décomposant l’histoire du mouvement en décennies :
- les années 60 : les racines du Metal et les pionniers
- les années 70 : l’explosion du hard rock et la naissance du heavy metal - les années 80 : l’âge d’or du Metal et la multiplication des sous-genres - les années 90 : la fusion des genres et la fin de la suprématie des groupes des
années 70 et 80
- les années 2000 : l’état actuel de la scène et ses nouveaux développements
En espérant que cette séance soit l’occasion pour vous de découvrir les nombreux joyaux qui ont jalonné ce mouvement.
1. Les années 60 : les racines du metal et les
pionniers.
Les premiers balbutiements sont apparus dans la deuxième moitié des années 60, à l’époque du British Blues Boom et de la musique psychédélique.
De jeunes musiciens s’essayent au blues et vont en donner une version quelque peu déformée. Les musiciens qui vont marquer ces courants et qui vont contribuer à donner naissance au hard rock des années 70 sont surtout des guitaristes : Eric Clapton (Yardbirds, Cream), Jeff Beck (Yardbirds), Jimmy Page (Yardbirds qui donnera naissance à Led Zeppelin), Peter Green (Fleetwood Mac), John Mayall, Paul Kossof (Free). Mais celui qui va le plus marquer les guitaristes de hard dans les décennies à venir est incontestablement Jimi Hendrix. D’origine américaine, ce jeune musicien s’était s’installé à Londres pour y faire carrière. Son jeu de guitare virtuose (surtout au niveau des solos) va profondément révolutionner l’approche de l’instrument ; son travail sur le son et les effets va introniser l’un des éléments caractéristiques du Metal : la distorsion. Ce procédé, qui permet de « grossir » le son en lui donnant des sonorités métalliques, est utilisé par tous les groupes de Metal.
Aux Etats-Unis, le mouvement est également en gestation avec des groupes comme Blue Cheer ou Steppenwolf.
Blue Cheer
Photo : Michael Ochs Archives
On peut dater la naissance du Metal avec la parution en janvier 1969 du premier album de Led Zeppelin. Tous les éléments caractéristiques du Metal sont réunis sur ce disque : guitares mises en avant, morceaux construits autour d’une mélodie de guitare simple et entêtante (ce que l’on appelle un riff et qui est souvent joué sur deux cordes - les fameuses « power chords » - , une voix haut perchée et une rythmique puissante et « carrée ». Un deuxième album, « Led Zeppelin 2 », suivra rapidement en octobre 69 avec là encore des chansons mémorables, comme Whole lotta love. Il va clore ainsi cette décennie et annoncer le déferlement qui va arriver dès 1970.
Blue Cheer : Summertime blues
2. Les années 70 : l’explosion du hard rock et la
naissance du heavy metal.
Black Sabbath Led Zeppelin Deep Purple Phil Lynott Van Halen
Photo : DR Photo : DR Photo : DR Photo : DR Photo : DR
Led Zeppelin ne va pas rester seul très longtemps sur ce créneau puisque l’année 1970 va voir la parution du premier album de Black Sabbath et de l’album « In rock » de Deep Purple. Ces trois groupes seront parmi les plus populaires des années 70. On ne parle pas encore à cette époque de Metal ou de heavy metal, mais de hard rock. Au niveau des thèmes, ce genre est assez proche du rock (sexe, odes au rock’n’roll et à son mode de vie, humour macho...). Par la suite, il sera établi que la parution du premier album de Black Sabbath a marqué la naissance du heavy metal. La distinction peut sembler floue mais on peut néanmoins remarquer une certaine rupture avec l’héritage blues dans ce disque, notamment au niveau du jeu de guitare et des thèmes évoqués.
Tous ces albums vont avoir un énorme succès public et les années 1971 à 1975 vont voir l’apparition de nombreuses formations des deux cotés de l’Atlantique. En Angleterre on peut citer : Thin Lizzy, Queen, UFO, Nazareth, Uriah Heep... Aux Etats-Unis ce sont Alice Cooper, Kiss, Aerosmith, Montrose qui vont rapidement remplir les stades avec des shows grandiloquents. En Australie, les excellents AC/DC ont sans doute composé les riffs les plus mémorables de l’histoire du hard rock et seront suivis par Rose Tattoo. En Allemagne, Scorpions débute timidement sa carrière qui explosera quelques années plus tard. En France, les Variations ont tenté une carrière dès 1969 avec un Hard rock à la Led Zeppelin de très bonne facture sans toutefois rencontrer le succès. Il faudra attendre 10 ans et l’arrivée de Trust pour trouver le premier (et dernier) cas de succès en matière de hard à la française.
Par contre au niveau de la presse rock, le jugement est sans appel : musique sans intérêt pour jeunes écervelés. Les critiques sont assassines, et se sont elles qui vont user les premières des superlatifs qui resteront attachés à ce style de musique : chant suraigu, violence de la musique et des textes, guitaristes démonstratifs, surenchère musicale, etc... L’emploi de ces termes peut paraître exagéré pour la musique des années 70 mais il s’accordera parfaitement aux différents courants des années 80...
Face à l’énorme succès de groupes tels Kiss, Queen ou Led Zeppelin (sans oublier les grands groupes de l’époque comme Pink Floyd, Yes, Genesis...), le rock devient une industrie très lucrative. La dimension contestataire qui existait à la fin des années 60 disparait. Coté scène, fini le bricolage des manifestations comme Woodstock : les tournées deviennent mondiales et les concerts se font dans des stades. Les groupes vont offrir des shows de plus en plus spectaculaires. On assiste alors à une surenchère en matière d’amplification, d’effets pyrotechniques, de jeu de scène. Symbole de ce changement, le groupe Kiss, dont les membres apparaissent maquillés à outrance, juchés sur des platform-boots et dont chaque
concert est ponctué par de nombreuses explosions. Dans un registre plus Grand-Guignol, Alice Cooper va choquer l’Amérique en simulant des décapitations grâce à une fausse guillotine trônant au milieu de la scène. Cette exubérance trouvera son épilogue au niveau musical en 1978 avec Van Halen. La notion de guitar-hero va faire son entrée. Le guitariste Eddie Van Halen va développer de nombreuses techniques dans le jeu de guitare (taping, sweeping) qui seront reprises par beaucoup.
Comme pour la musique progressive de groupes tel Yes ou Genesis, ce gigantisme va détourner une partie du public vers des choses plus « underground ». C’est dans la deuxième partie des années 70 que l’on va voir apparaître une relève avec des groupes anglais comme Motörhead ou Judas Priest.
Mené de main de maître par Lemmy Kilmister, Motörhead va introduire la vitesse dans le metal avec notamment le morceau Overkill et l’utilisation par le batteur d’une double grosse caisse. La voix rauque de Lemmy va trancher avec les chanteurs « hurleurs » alors à la mode. L’aura qui entoure le groupe et les déclarations du chanteur (« si Motörhead s'installait à côté de chez vous, votre pelouse mourrait ») vont forger l’image du metalleux sale, agressif et violent.
Judas Priest va quand à lui introniser le heavy metal comme genre à part entière en supprimant toute référence au blues (même si les deux guitaristes restent de fervents admirateurs de Jimi Hendrix). Le groupe a débuté sa carrière au début des années 70 mais ne connaîtra le succès que vers 1977. La voix aiguë du chanteur dépasse tout ce que l’on a pu entendre jusque-là, la musique est froide et glacée, les deux guitaristes se livrent à des « duels » de solos rapides, le son devient réellement « métallique », l’accoutrement cuir-clous va trancher définitivement avec le look hippie des musiciens de hard des années précédentes. L’album « British steel » de Judas Priest est une parfaite compilation de ce que le groupe a produit auparavant et comporte tous les ingrédients qui resteront attachés au heavy metal : des morceaux rapides aux structures hachées (Rapid fire), d’autres qui au contraire ont une structure dépouillée au maximum avec des refrains spécialement composés pour être repris par le public lors des concerts (Breaking the law, Living after midnight...), la présence de deux guitaristes qui se répondent lors de solos rapides et agressifs, la voix du chanteur qui passe des graves aux aigus et qui est plus utilisée comme un instrument que comme moyen de mettre en valeur des textes.
Ces deux groupes vont constituer l’archétype du groupe metal des années 80. Ils vont donner naissance à la Nouvelle Vague du heavy metal britannique (New Wave Of British Heavy Metal ou N.W.O.B.H.M.) qui va exploser au début des années 80.
3. Les années 80 : l’âge d’or du metal et la
multiplication des sous-genres.
Cette décennie va démarrer très fort avec l’arrivée en Angleterre d’une nouvelle génération de jeunes groupes qui vont renouveler le style et populariser le heavy metal. On va assister à une surenchère en termes de vitesse et d’agressivité avec l’apparition successivement du thrash et du death metal. Aux Etats-Unis, les ondes radios seront dominées par une forme plus commerciale de metal : le glam/hair metal. Plus généralement, on peut considérer les années 80 comme l’âge d’or pour cette musique (succès considérable, émulation artistique, publication de nombreux « classiques ».)
La New Wave Of British Heavy Metal et le sacre du Heavy metal
Saxon Iron Maiden Mercyful Fate
Photo: DR Photo : DR Photo : DR
La N.W.O.B.H.M. n’est pas à proprement parler un style mais plutôt un acronyme permettant de couvrir tous les groupes apparus en Angleterre à cette période. Ils ont renouvelé les schémas du hard et du heavy metal pour en faire une musique plus énergique et violente. Comme pour le punk, on peut dire que cette vague va emporter tous les groupes établis des années 70 en renouvelant le genre. Les similitudes avec le punk ne s’arrêtent pas là puisque l’on va voir l’apparition de structures indépendantes et le développement d’une scène et d’un esprit dits underground. Les groupes se font d’abord connaître par la scène et par la distribution de démos. Des petits labels comme Neat Records naissent et diffusent pléthore de groupes, aux productions pas toujours excellentes mais néanmoins rafraîchissantes. Une presse spécialisée va également naître de cet engouement (par exemple Hard Rock Magazine ou Enfer Magazine en France) et tout un réseau parallèle va se mettre en place, que ce soit au niveau de la diffusion ou pour la création de festivals. Les morceaux sont rapides, les textes s’inspirent de la littérature fantastique et des films d’horreurs, le son des guitares est marqué par une distorsion plus appuyée.
Le groupe le plus connu de cette période reste sans conteste Iron Maiden dont l’album « The number of the beast » va marquer le sommet du heavy metal du début des années 80. Son succès est tel qu’il a presque fait oublier tous les groupes qui officiaient avec lui à cette période. Pourtant cette scène a regorgé d’excellents groupes comme Angel Witch, Saxon, Diamond Head ou Venom. Mal soutenus par leurs maisons de disque, beaucoup vont essayer de rendre leur musique plus accessible pour pouvoir conquérir le marché américain
mais sans succès (un seul groupe va y arriver : Def Leppard). Peu résisteront à l’arrivée du thrash metal vers 1985...
Le reste de l’Europe ne reste pas longtemps à la traîne et la réplique va vite arriver d’Allemagne avec Accept, mais également du Danemark avec Mercyful Fate. Le succès sera plus durable dans ces pays avec l’arrivée de nouveaux groupes tel Helloween vers 1985.
En France le succès inattendu du groupe Trust va permettre le lancement d’une scène heavy metal. Les groupes les plus connus furent Warning, Satan Jokers, H-Bomb, Vulcain... Mais l’engouement va malheureusement vite retomber. Comme en Angleterre, la plupart des groupes splittent avant 1986. Pour se faire une idée de cette scène française, nous vous conseillons l’écoute de la compilation « Génération hard-rock : l’anthologie du hard¬rock français des années 80, vol. 1 »
Curieusement, les Etats-Unis ne proposent rien de similaire à cette période, la musique metal étant encore dominée par des groupes comme Van Halen et Kiss. Mais les disques en provenance d’Angleterre sont avidement recherchés par les adolescents américains et leur réponse sera encore plus violente puisqu’elle va donner naissance au Thrash metal.
Iron Maiden : The trooper
Mercyful Fate : Evil
Le Thrash
Metallica Slayer
Photo : DR Photo : DR
Ce style va aller encore plus loin que le heavy metal en terme de vitesse et d’agressivité. Il s’est développé grâce à un système d’échange de cassettes, le tape-trading. Ce procédé va permettre la diffusion en dehors des circuits établis de groupes comme Metallica, et ce dans le monde entier, bien avant leur signature sur de gros labels. Le premier album de thrash à sortir est « Kill’em all » de Metallica en 1983. Encore très imprégné par les groupes heavy anglais, le combo américain se démarque par la vitesse des morceaux. Il est vite suivi par Slayer, Megadeth et bien d’autres groupes. Le pic artistique sera atteint en 1986 avec les parutions simultanées du « Reign in blood » de Slayer et du « Master of puppets » de Metallica. Sur l’album de Slayer, les mélodies ont pratiquement disparues ne laissant la place qu’à une succession de riffs tranchants et de solos débridés. Les chansons ne s’attachent qu’aux côtés noirs de la nature humaine. L’approche de Metallica se veut plus mélodique et reste ainsi plus attachée aux groupes anglais qui les ont inspirés. En une espèce d’aller-retour, la scène américaine va engendrer une scène thrash en Europe avec des groupes comme Kreator, Coroner ou Celtic Frost. L’approche de ces groupes se voulant encore plus sombre, elle va influencer nombre de formations américaines et anglaises et donner naissance
au death metal. A signaler également le beau succès du groupe brésilien Sepultura, champions incontestés du thrash à la fin des années 80, et qui vont réussir à faire évoluer leur style en incorporant des éléments de musique brésilienne traditionnelle dans leur album de 1996 « Roots » créant ainsi la première formule réussie de fusion du metal avec les musiques du monde.
Metallica : Ride the lightning
Slayer : Criminally insane
Le Glam rock ou hard FM
Motlëy Crue Def Leppard Bon Jovi
Photo : DR Photo : DR Photo : DR
Apparu principalement en Californie vers 1981 avec les groupes Motlëy Crue, Twisted Sister ou Quiet Riot, ce courant va dominer les charts et les ondes américaines durant toute les années 80, vendant des albums par millions et remplissant les stades. Hormis le Japon et l’Angleterre, ce succès ne rencontrera qu’un faible écho dans les autres pays. Ces groupes sont restés fameux pour le look vestimentaire et les coiffures de leurs membres qui se sont inspirés des grandes figures du Glam rock anglais des années 70 (David Bowie, Marc Bolan...) mais aussi des groupes américains Kiss ou Aerosmith. Musicalement, les chansons sont construites autour d’un riff et d’un refrain facilement mémorisable, jouées le plus souvent par des musiciens d’une grande technicité (beaucoup sont des musiciens de studio), mais dans un format beaucoup plus pop que le heavy metal. Même si en surface elles en conservent l’énergie et l’agressivité, la production va les calibrer pour des passages en radio ou à la télévision (la chaine naissante MTV va fortement contribuer à populariser ces formations).
C’est le groupe anglais Def Leppard qui va vraiment populariser ce style avec leur album de 1983 « Pyromania » (dix millions d’exemplaires vendus...) La production de Robert John « Mutt » Lange y est pour beaucoup. Tous les ingrédients présents sur ce disque seront repris et feront la gloire d’artistes comme Jon Bon Jovi. En 1987, Guns’N’Roses va marquer les esprits avec leur album « Appetite for destruction », grand succès commercial avec cette fois un retour au hard rock plus violent et une attitude plus dans la grande tradition du rock’n’roll. Le mouvement ne survira pas à la vague grunge de 1991.
Def Leppard : Photograph
Le Death metal
Carcass Morbid Angel Suffocation
Photo : Ian Tilton Photo : Michael Haynes Photo : DR
Le death metal fait son apparition vers le milieu des années 80 dans le sillage de groupes Thrash comme Kreator ou Slayer. On pensait à cette époque avoir atteint le sommet en termes de vitesse et de musique agressive mais de jeunes musiciens vont venir démontrer le contraire. Aussi qualifié de Metal extrême, le death va pousser la musique Metal dans ses derniers retranchements. Au niveau du rythme, on va voir l’apparition du blast-beat (pattern rythmique supérieur à 150 Bpm). Au niveau de la voix ensuite (on ne parle plus de chant) avec des vocaux dits gutturaux. Aux niveaux des textes et du visuel enfin avec une exploration au second degré des clichés du cinéma d’horreur et/ou du satanisme. Là encore, le mouvement se fait connaître grâce au tape trading mais également grâce au célèbre DJ londonien John Peel. Il en parlait en ces termes : « Je considère le death metal comme un retour du punk extrême. Cette musique est un pas de plus vers un territoire hors la loi situé au- delà de toute musique agressive jamais entendue ». Les premiers albums sortiront de manière professionnelle vers 1987/1988 sur des petits labels dédiés comme Earache. Le style sera très populaire dans le milieu underground entre les années 1989 et 1992. Le marché va être inondé à cette période de nouveaux groupes plus ou moins bons et ce phénomène va finir par étouffer le mouvement.
Les grands groupes sont anglais (Carcass, Napalm Death), américains (Morbid Angel, Obituary, Suffocation, Cannibal Corpse) et suédois (Entombed). En France on peut citer Loudblast et des formations plus récentes comme Gojira ou Scarve qui dépoussièrent un peu le style. Ces deux formations semblent d’ailleurs rencontrer un certain succès à l’étranger.
De part son extrémisme, le death metal semble condamné à rester dans l’underground, même si des formations comme Slipknot ont obtenu un gros succès international en s’en inspirant.
Carcass : Exhume to consume
Suffocation : Souls to deny
Le Doom metal
Saint Vitus
Photo : Naomi Petersen
Ce style est né au début des années 80 aux Etats-Unis avec le groupe Saint Vitus. Il marque un retour à une forme plus traditionnelle du heavy metal tel qu’il était pratiqué par Black Sabbath au début des années 70. La musique se caractérise par une lenteur dans l’exécution, une simplicité dans la structure (peu de riffs, les chansons s’étirent dans une structure simple) ainsi qu’un retour aux thèmes développés par la bande à Ozzy Osbourne et Tony Iommi (dépression, dépendance, occulte). Ce courant est toujours resté très underground, ne touchant qu’un public assez restreint mais néanmoins fidèle. Il va se développer un courant parallèle dans les années 2000, marqué par une forte expérimentation et qui va toucher autant les amateurs de metal que le public de musique d’avant-garde.
4. Les années 90 : la fusion des genres et la fin
de la suprématie des groupes des années 70 et 80.
Outre le succès (assez restreint) du death metal et du black metal, le début des années 90 commence assez mollement. Un évènement va venir bouleverser cet inertie : la publication de l’album «Nevermind » de Nirvana et plus généralement l’arrivée du Grunge. Subitement, tout ce qui était à la mode en termes de metal devient complètement ringard et le metal devient presque une maladie honteuse. Beaucoup de groupes se trouvent lâchés par leurs maisons de disques et cette « révolution » va sonner le glas pour les courants thrash, glam/hair metal et heavy metal. Quelques groupes vont néanmoins réussir à tirer leur épingle du jeu. Tout d’abord Metallica qui avec la publication du « Black album » va dominer les charts en offrant une version plus commerciale (au sens noble du terme) de leur musique. Ensuite le groupe Pantera, qui va réussir à créer une alchimie parfaite entre les musiques thrash, heavy metal et hardcore. Dans un même registre, on peut également citer le groupe Machine Head. Mis à part ces quelques gros succès isolés, on peut dire que le metal s’est plutôt fait discret, s’intégrant de manière variable dans d’autres courants des musiques populaires (rap, funk, musique industrielle, etc...). Voyons néanmoins les courants marquants de cette décennie :
Pantera : Becoming
Le Black metal
Emperor Photo : DR
Ce genre à part dans l’histoire du metal est plus connu pour ses faits divers (meurtres, incendies d’églises, racisme...) que pour sa musique. Le Metal a souvent été entouré d’une aura négative, du fait notamment du visuel parfois violent des pochettes, des thèmes abordés et des rumeurs de messages subliminaux sur certains morceaux. La polémique a surtout été vive au Etats-Unis et plusieurs procès ont été intentés dans les années 80 mais sans jamais aboutir à des condamnations. La Metal a surtout été victime d’une méconnaissance de la part du grand public et le rejet dont il a été victime par les médias a pu favoriser ce type de colportage. La polémique s’est ensuite calmée face notamment à l’avènement du gangsta rap. L’arrivée du black metal a malheureusement ravivé des doutes mais les dérives de certains membres de ce mouvement ne doivent pas être généralisées au courant metal tout entier.
Inspirés par la musique de Venom et de Bathory, une nouvelle scène va naitre en Norvège vers 1990. Elle va sortir de l’anonymat par des faits divers particulièrement sordides. La musique se caractérise par un chant hurlé, une production volontairement pauvre et des sonorités propres à créer des atmosphères désagréables. Les paroles sont centrées sur le satanisme, l’occulte et le paganisme. Ces thématiques extrêmes vont pousser plusieurs formations à adopter une posture ouvertement raciste et antichrétienne. Même si ces extrémités restent minoritaires, il convient de signaler que la plupart des formations norvégiennes qui ont contribué à créer cette scène ont eu à répondre de ces accusations. Difficile de ne pas faire d’amalgame une fois énoncées ces données mais il existe néanmoins des groupes n’ayant pas d’idéologie douteuse et qui vont réussir à créer une musique originale, basée sur une exploration presque mystique des cotés sombres de la nature humaine. On peut citer Emperor et Cradle Of Filth.
Emperor : Cosmic keys to my creations and times
Le néo metal
Korn Slipknot
Photo : Joseph Cultice Photo : Dean Karr
Il fait son apparition en 1994 avec la parution de l’album éponyme de Korn. La musique du combo se caractérise par un mélange de metal dépouillé (pas de solos, simplicité dans la composition, un accordage très bas des instruments), une rythmique hachée mais non dépourvue de groove, une voix alternant un chant hurlé et un phrasé rap. Le succès immédiat de Korn va lancer la carrière de nombreux groupes, les plus intéressants étant Deftones, Slipknot, System Of A Down. Tous ces groupes sont allés puiser des éléments dans la musique metal, le rap, la musique industrielle, le hardcore, etc... C’est pourquoi ont pourrait presque qualifier cette musique de fusion.
Korn : Blind
La fusion
Faith No More Godflesh Suicidal Tendencies
Photo : Glen LaFerman Photo : John Falls Photo : Chris Cuffaro
Appellation fourre-tout qui va permettre de classer beaucoup de formations des années 1990. La démarche de nombreux musiciens dans cette décennie va être de faire évoluer le metal en y incorporant des éléments venants d’autres styles (rap, musique industrielle, funk, grunge, musique gothique, etc...). Il est parfois difficile de déterminer si telle ou telle formation peut être qualifiée de Metal ; l’élément déterminant sera le plus souvent l’utilisation ou non d’une grosse saturation des guitares.
On peut citer pour les plus connus :
- Faith No More : un des précurseurs, apparu dès 1981 mais qui va vraiment décoller avec leur album « The real thing » en 1989. Le groupe mélange metal, funk et rap.
- Suicidal Tendencies : ces californiens proposent un savant mélange de thrash, de hardcore. Ils développeront ensuite sous le nom Infectious Groove un coktail explosif de metal et de funk.
- Body Count : groupe formé par le rappeur Ice-T, il propose une fusion du metal et du gangsta rap.
- Rage Against The Machine : une des formations les plus populaires des années 1990 avec notamment leur premier album de 1992, savant mélange de rap, de funk et de metal.
- Marilyn Manson : gros succès commercial grâce au mélange d’éléments de la musique industrielle, de la musique gothique et de grosses guitares.
- Rammstein : là aussi on retrouve des éléments industriels conjugués à des guitares saturées.
- Godflesh : trop méconnu, ce combo de Birmingham est néanmoins l’un des précurseurs du mélange metal/musique industrielle.
- Type O Negative : mélange original de metal et de musique gothique. - Sick Of It All : groupe de harcore mais intégrant un son metal.
Biohazard : Tales from the hard side
5. Les années 2000 : l’étal actuel de la scène et les
nouveaux développements.
Sunn 0)))/Boris Mastodon
Photo : DR Photo : J. Hubbard
En ce début de siècle, la musique metal reste encore dominée par le courant néo metal et certains groupes comme Marilyn Manson. On a vu l’apparition, dans un registre gothique/romantique de groupes dominés par des chanteuses, délivrant une musique metal plutôt commerciale (Evanescence, Within Temptation.) Dans un registre assez proche du rock, on a pu remarquer le beau succès d’un courant appelé Stoner (mélange de metal à la Black Sabbath et de musique psychédélique). Apparu néanmoins 10 ans auparavant avec le groupe Kyuss, ce courant s’est développé timidement dans les années 90 pour devenir populaire en 2000 avec les Queens Of The Stone Age (où officient deux membres de Kyuss). Parallèlement à cela, on peut remarquer un retour à plusieurs formes traditionnelles de metal avec les groupes Datsuns (hard rock), The Darkness (heavy metal), les francais de Goj ira et Scarve (death metal).
Parmi les évolutions qui semblent se profiler, on peut remarquer toute une scène expérimentale caractérisée par une musique extrêmement lente et dont le travail au niveau du son est particulièrement intéressant. Diffusée par des petits labels américains (comme Southern Lord et Hydra Head), les groupes s’inspirent à la fois du Doom metal et de la musique dite post-rock ou ambient. Les morceaux sont souvent très longs, les musiciens sont accordés très bas et répètent des motifs à l’infini créant ainsi une ambiance particulière. Cette démarche peut les rapprocher d’artistes comme Brian Eno ou Tony Conrad (dans un registre nettement moins « relaxant » tout de même...) Les meilleurs représentants sont les Américains de Sunn 0))), Khanate, Earth, les Japonais de Boris et les Anglais de Jesu.
Dans un registre plus agressif, citons quelques formations auxquelles on ne peut pas encore coller d’étiquette mais qui rencontrent un certain succès : Mastodon, Dillinger Escape Plan.